J’ai rêvé à comment je réagirais le jour où j’apprendrais le diagnostic. J’ai scénarisé 100 fois ce moment fatidique. Je me sentais prête à toute éventualité. Ensuite les mots de la docteure ont retentis dans mes oreilles: “Mme Sicotte, M. Plourde, votre fils Teddy est autiste”…
Les larmes ne sont pas venues tout de suite, la peur non plus. Ce que j’ai ressenti dans cet instant a été du soulagement. Finalement, nous savions. Finalement, nous pouvions regarder en avant et commencer à trouver des façons d’aider notre petit bonhomme à atteindre son plein potentiel dans la vie, quel qu’il soit. C’était au mois juillet 2013, Teddy avait à peine 3 ans, le jour où tout à basculé.
Les larmes sont venues ce soir-là par contre, et les jours qui ont suivis aussi. Non pas parce que la vie était injuste de doter un enfant si jeune d’un fardeau si lourd à porter; non j’ai pleuré parce que j’avais peur que le “monde” lui fasse du mal, que les gens n’aient pas le discernement de comprendre sa différence et peur qu’il devienne le bouc émissaire d’enfants et éventuellement d’adultes aux prises avec des jugements et des concepts de comment il “faut” agir ou se comporter en groupe et en société.
Les jours ont passés, le soleil a continué de se lever chaque matin, mon mari et moi nous sommes beaucoup parlés et puis j’ai observé notre fils. Je l’ai regardé des heures de temps: contempler les rayons de soleil qui touchaient le bout de ses petites mains potelées, stationner ses petites automobiles le long de notre foyer, tournoyer sur lui-même à s’en étourdir, ou faire voler tout près de ses yeux son “Big Jet” adoré et j’ai compris…
Un cadeau
Le 12 mars 2010, après un accouchement rocambolesque de moins d’une heure, mon petit garçon de 9.5 livres, tout bleu parce qu’il avait son cordon enroulé 3 fois autour du cou est né. Ce jour là, la vie nous a fait le plus beau cadeau du monde… celui de la différence.
Dès ses premiers jours nous savions qu’il était “spécial”. Il ne pleurait presque pas. Il pouvait demeurer dans son petit lit, les yeux grands ouverts, des heures de temps sans pleurer à contempler le plafond et les jeux de lumières sur les murs de sa petite chambre. Les étapes d’apprentissage conventionnelles des enfants étaient un concept plus flou pour Teddy, mais on nous rassurait en nous disant: “c’est un garçon, c’est plus long pour un petit garçon”.
Pourtant, qu’importe ses lacunes importantes au niveau de la motricité ou de son langage, Teddy dégageait la sérénité et le bonheur. Peu attiré par les jouets commerciaux et les babioles bruyantes, il s’est attaché à un vieil avion de métal des années ’50 que je lui ai déniché en brocante et “Big Jet” et lui sont devenus inséparables. Il fallait lui extirper des mains pour l’habiller ou lui faire prendre un bain, le retirer de sous son petit corps endormi la nuit et le cacher dans son casier pour qu’il accepte d’aller à la garderie.
Et aujourd’hui, le 2 avril
Et bien aujourd’hui, notre petit loup a 4 ans, il parle en anglais (une rigidité linguistique parfois observée chez les enfants autistes) avec un ajout libéral de mots que seul Teddy comprend, il joue et s’amuse, il découvre la musique à travers la thérapie et il est s’épanoui un peu plus chaque jour. Je sais que le fait qu’il soit différent ne rendra pas facile son parcours de vie, du moins aux yeux des standards de normalité de la société, mais à ses yeux et dans son univers à lui, la vie est multicolore et pleine de musique et de possibilités.
En ce 2 avril, journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme, je vous partage l’histoire de notre Teddy car si un jour vous avez l’immense plaisir de le croiser, je souhaite que tous puissiez remarquer que ce qui le rend différent est une qualité plutôt que quelque chose qu’il faille “casser” par soucis de convenance et par désir de cocher les cases établies par les chartes de la société.
Aujourd’hui, je suis fièrement habillée de bleu et j’ouvre grand les yeux et mon coeur aux gens autour de moi qui sont aussi différents, car je sais qu’en chacun d’eux j’y découvrirai un immense cadeau.
xoxo
v.
À lire:
The Spark: A Mother’s Story of Nurturing Genius
Born on a Blue Day: Inside the Extraordinary Mind of an Autistic Savant
10 choses que les enfants autistes aimeraient que vous sachiez
Hausse fulgurante de cas d’autisme au Québec: La Presse, 6 janvier 2014
Du nouveau sur l’autisme: Yooppa
À regarder:
Ressources:
Société Canadienne de l’Autisme
Fédération Québécoise de l’Autisme
Suzy Wong says
Très touchant. Disons que j’ai vécu quelque chose de similaire et pourtant aussi de très différent. J’ai à peu près réagi comme toi le jour où j’ai appris que mon fils de 16 mois avait la diplégie spastique la forme frustre. J’ai figé d’abord, j’ai pleuré ensuite toutes les larmes de mon corps une bonne soirée.
Aujourd’hui, après beaucoup de rééducation et d’orthophonie, il marche sans problème, court même et parle assez bien. Donc, dans son cas, même s’il court d’une bien drôle de manière, il vivra sans trop de problème dans la société qu’on a. Mais le jour où le diagnostic était tombé, ça on ne le savait pas.
La vie et les enfants nous réservent beaucoup de surprises et, quand ils sont un peu différents de la norme, ils nous offrent, comme tu l’as écrit, le plus beau cadeau du monde… celui de la différence.
Merci encore pour ce billet.
Vanessa says
Merci de ce beau témoignage Suzy. Je suis de tout coeur avec toi.
karine matte says
Quel beau texte Vanessa… Très touchant…
J’ai toujours voulu te ré-écrire suite à ta visite à la maison et surtout suite à la déco à thématique Moby Dick de bébé Louis que tu as si bien exécutée…
Car sans le savoir, en transformant sa chambre une guérison pour maman s’est produite aussi.
En avril 2013 bébé Louis a été diagnostiqué avec une insuffisance des glandes surrénaliennes. Comme toi, le diagnostic fût sans larme et même un soulagement : nous connaissions le ”problème”.
Heureusement cette maladie se traite avec une médication à vie. Mais c’est quand le docteur m’a annoncé que Louis devrait porter un bracelet médical toute sa vie que j’ai craquée… Bizarre je sais mais en fait c’est à ce moment là que j’ai réalisé que Louis serait ”étiquetté” à vie avec son état de santé au poignet. Qu’à chaque jour en lui mettant, je me rapellerais sa ”condition”… J’ai donc foncé tête première et tous ensemble, nous avons choisi un bracelet avec des…. baleines!!
Quel ”hasard” !! 2 mois plus tard sans savoir notre histoire tu lui créa une chambre à thématique de baleines !! Cette chambre pour moi est un nouveau départ et j’étais plus que soulagé de me ”débarasser” des énergies de l’ancienne chambre ou nous avons vécu quelques drames suite à sa condition non traitée.
Moby Dick fait maintenant parti de ma vie comme d’un renouveau et surtout d’une vision nouvelle sur la vie.
Je te souhaites toute la force nécessaire et finalement de vivre avec ton Teddy chaque jour, au jour le jour car c’est le seul qui compte. Gros Bisousxx
Vanessa says
Je suis vraiment désolée de lire ceci Karine, je ne savais pas et pourtant il semble qu’inconsciemment j’ai dû m’en douter pour offrir à Bébé Louis de belles baleines avec lesquelles faire de beaux rêve. Tant mieux si mon passage a pu ajouter un peu de baume à une situation autrement difficile. Bon courage! v
Carolyne Soulard says
Quel beau texte! Très touchant et surtout, on sent toute la tendresse qui en ressort. J’ai vécu quelque chose de semblable avec le diagnostic de notre fils en juin 2012: syndrome d’Asperger. Il a maintenant 12 ans et je ne l’échangerais pour rien au monde! Il faut que cessent les tabous concernant les enfants “différents” Il en va ainsi du futur de nos enfants!
Merci de mettre en mot ce que j’ai bien des parents n’osent dire tout haut…
Vanessa says
Merci Carolyne et je suis contente de voir que vous partagez aussi cette vision que nos enfants “différents” sont exceptionnels!
Marie-Josée Bettez says
Superbe texte, touchant et positif à la fois. Merci!
Vanessa says
Merci Marie-Josée!
Colette Bordeleau says
Je me change en bleu immédiatement, merci Vanessa de partager. Je vous envoie des ondes positives.
Vanessa says
Merci Colette!
Charlotte says
Ma Vava d’amour !!! Je vais porter fièrement du bleu pour ton fils, ta famille et toutes les personnes que je connais qui ont la chance d’avoir un petit être spécial dans leur famille, une personne qui a une sensibilité autre. Je pense souvent aux autistes et je me dis que leur vision de la vie est bien plus belle que notre Monde. J’ai l’impression qu’avec leurs yeux, la liberté est toujours présente.
Merci d’avoir ouvert ton coeur comme tu le fais si peu sur ce blogue. C’est avec un immense plaisir que je t’ai lue à mon réveil.
Je te fais des milliers de bisous. <3
Vanessa says
Merci ma bele charlotte! Tu es un vrai rayon de soleil!
Katherine says
Merci pour ce touchant partage. Notre fils aussi est différent, car il est malentendant depuis la naissance mais effectivement la réaction se fait parfois à rebours. Cela fait partit du processus d acceptation je suppose. Bon courage avec votre trésor.
Vanessa says
Merci Katherine et bon courage à vous et votre petit bonhomme aussi.
Marie says
Bonjour Vanessa, je suis très touché par le très beau partage que nous fais ce matin.
Une de mes bonnes amies à elle aussi un petit garçon de 4 ans prenomé Milo et qui comme ton petit Teddy est autiste.
Je me permet donc ce matin de te partager une très belle initiative de Sidonie ( la maman de Milo ) une superbe journée nous attends ce dimanche 6 avril, une journée de sensibilisation ,peinture,concert et animation sont au programme ;) je te met le lien et qui sait peut être nous croiserons nous a cette magnifique journée ;) gros bisous xxx
Page Facebook l’Asso de Milo
Bonne journée bleu ;)
Marie.
Emilie says
Un très beau texte, émouvant et sensible à ton image, et à l’image de ton fils. Comme toi, je pense que les personnes “différentes” sont des cadeaux qui nous sont envoyés pour que l’on apprenne à regarder le monde différent et à apprécier la vie qui nous est offerte.
Merci d’avoir partagé l’histoire de Teddy avec nous, je suis sûre que cela aidera beaucoup de personnes.
Kloé says
Bonjour Vanessa, c’est un très beau texte, plein de tendresse et de douceur. J’ai un frère âgé de 21 ans qui est autiste comme ton petit bonhomme. Il a fait beaucoup de chemin depuis que les médecins nous ont annoncé son diagnostic. Je suis très fière de lui. Les gens sont parfois désagréables, méchants et peu ouverts face aux différences. Cependant, on doit aller au-delà de tous les commentaires, regards désapprobateurs et froncements de sourcils. La vie avec une personne différente nous amène à voir les choses sous une autre perspective. Il y a des hauts quand on rencontre des succès et de belles réussites, mais il y a aussi des bas. Il faut garder espoir, être patients et persévérer.
Je vous envoie, à toi, à toute ta famille et à ton petit bonhomme, tout plein d’énergie, de pensées positives et d’amour. Vous le méritez grandement (je parle en connaissance de cause!).
Merci à toi pour ce beau témoignage. C’est en parlant de l’autisme et en partageant avec les gens que ceux-ci seront mieux informés et peut-être plus tolérants.
Liette Bernard says
Bonjour Vanessa,
C’est un très beau billet, très inspirant et positif pour tous les parents d’un enfant différent. Merci à toi pour ce partage et à Teddy de nous faire découvrir la beauté de son monde. xx
Julia says
Bonjour Vanessa,
Merci pour ce texte très touchant qui reflète mes pensées aussi.
Notre petit autiste a trois ans. Il ne parle pas. En plus, il habite dans l’environnement bilingue.
Les histoires comme le votre nous donne l’éspoir.
Mais j’ai plein de doutes aussi, j’ai peur de perdre le temps. C’est pourqoui
j’aimerais vous poser quelques questions par courriel, concernant l’intervention et langage.
Je vous remercierais si vous pourriez m’écrire sur zadaven13@gmail.com
Mama de Vincent